La narcolepsie : zoom sur une maladie rare
La narcolepsie, un trouble du sommeil à part
Troubles du sommeil - 10 minutes de lecture
La paralysie du sommeil, voilà un trouble du sommeil qu’on connait et qu’on reconnaît mais qui demeure pourtant encore assez mystérieux, même pour les scientifiques. Si elle peut être un des symptômes de la narcolepsie, la paralysie du sommeil peut également être isolée et récurrente, c’est-à-dire toucher n’importe qui, même des personnes ne souffrant d’aucun autre trouble du sommeil. C’est peut-être là que réside la part de mystère de cette parasomnie : tout le monde peut y être confronté ! Mais alors, que sait-on vraiment à propos de la paralysie du sommeil ? Pourquoi ce trouble du sommeil peut-il virer au cauchemar ? Voici quelques éléments de réponse !
C’est un trouble du sommeil qui se caractérise par une incapacité à bouger. On est conscient de son état, mais l’inhibition des muscles est telle qu’il est impossible d’effectuer des mouvements. La paralysie du sommeil est un symptôme de la narcolepsie qui est classée en tant que parasomnie, c’est-à-dire un trouble du sommeil caractérisé par un ensemble d’événements comportementaux ou psychiques anormaux et indésirables qui se produisent durant le sommeil, ou à la frontière entre le sommeil et l’éveil. La paralysie du sommeil récurrente est une parasomnie du sommeil paradoxal, elle peut être hypnagogique (au moment de l’endormissement) ou hypnopompique (au moment du réveil) : c’est une anomalie de la transition entre la veille et le sommeil, ou entre le sommeil et la veille.
Cette paralysie du réveil (hypnopompique) peut s’accompagner d’hallucinations auditives et/ou visuelles, la rendant alors encore plus angoissante, voire traumatisante. L’association entre les hallucinations et l’hypotonie musculaire (perte de tonus) en état de conscience a pour résultat de parfois mettre l'individu qui en est victime dans un tel état de peur et d’impuissance que la paralysie du sommeil donne lieu à des interprétations mystiques, bien au-delà de la science ! Outre les démons et autres mauvais esprits, ce phénomène parfois terrifiant a été décrit par l’écrivain Guy de Maupassant dans son célèbre conte fantastique « Le Horla », lui qui devait sans doute souffrir d’épisodes de paralysie du sommeil : « Je sens bien que je suis couché et que je dors... Je le sens et je le vois... et je sens aussi que quelqu'un s'approche de moi, me regarde, me palpe, monte sur mon lit, s'agenouille sur ma poitrine, me prend le cou entre les mains et serre... serre... de toute sa force pour m'étrangler. Moi, je me débats, lié par cette impuissance atroce, qui nous paralyse dans les songes ; je veux crier, je ne peux pas ». Voilà une parfaite description de ce traumatisant mystère !
Malgré le peu de données disponibles pour quantifier la prévalence de la paralysie du sommeil, le Dr Brian A. Sharpless et ses collègues des universités de Pennsylvania et Penn State aux États-Unis ont croisé les données de plus de 30 études ayant impliquées 35 000 individus afin d’établir une fréquence de ce trouble. Cette analyse datant de 20111 révèle ainsi que près de 8 % de la population a vécu ou vivra un épisode de paralysie du sommeil « au moins une fois dans sa vie ». Ce chiffre monte à près de 35% pour les personnes souffrant de troubles psychiatriques diagnostiqués (stress post-traumatique, attaques de panique…).
Une autre étude épidémique de 19992, effectuée sur un échantillon de 8085 sujets européens âgés de 15 à 99 ans, met en lumière les données suivantes concernant la prévalence de la paralysie du sommeil :
À ce jour, scientifiquement parlant, on a encore du mal à établir les causes exactes de la paralysie du sommeil. Néanmoins, des croisements entre diverses études tendent à dégager des facteurs communs aux victimes de ce trouble du sommeil. Une étude3 démontre clairement que la mauvaise qualité du sommeil est une cause régulièrement associée à la paralysie du sommeil. En outre, d’autres facteurs4 ont été mis en lumière pour expliquer cette dernière :
On constate donc que les personnes souffrant de troubles du sommeil (insomnie, narcolepsie) ne seraient pas plus exposées que les autres, même si les individus ayant des troubles du comportements diagnostiqués semblent plus enclins à être victimes d’épisodes de paralysie du sommeil.
Lorsqu'on se trouve dans la phase de sommeil paradoxal, notre corps est dans un état de paralysie qu’on appelle « atonie musculaire ». Cette atonie musculaire est provoquée par le cerveau dans le but d’empêcher le corps de se blesser pendant le sommeil. Elle est programmée pour s’arrêter d’elle-même au moment du réveil. Cependant, l’épisode de paralysie du sommeil provient du fait qu’un réveil s’opère pendant une phase de sommeil paradoxal, moment où l’activité cérébrale est intense, mais sans communication entre les muscles et le cerveau. On se retrouve donc dans un état éveillé mais dans l’incapacité d’agir sur ses muscles car le cerveau est toujours en mode « atonie musculaire ».
Si la paralysie du sommeil n’est pas dangereuse, en soi, pour la santé ou pour le corps, il n’empêche qu’elle peut s'avérer être très traumatisante dans sa forme la plus extrême, lorsqu’elle s’accompagne d’hallucinations particulièrement angoissantes. L’expérience de paralysie du corps se transforme alors en cauchemar éveillé. Les séquelles psychologiques de ce traumatisme peuvent être plus ou moins importantes en fonction des individus. Certains témoignages de personnes ayant été victimes d’épisodes de paralysie du sommeil5 sont d’ailleurs très éloquents et ne laissent pas indifférents, donnant même des idées de scénarios pour le cinéma ! Un documentaire saisissant, « The Nightmare6 », a été réalisé par Rodney Ascher, lui-même victime d’épisodes de paralysie du sommeil. Loin de jouer la surenchère de l’aspect terrifiant de cette parasomnie, il en livre une vision peut-être plus réaliste et objective encore au travers de différents témoignages.
On peut en fait décrire la paralysie du sommeil comme une « paralysie du réveil » lorsqu’elle est hypnopompique.
Voici les principaux symptômes de la paralysie du sommeil, recensés par différentes études7:
Le diagnostic de la paralysie du sommeil repose sur des signes cliniques recueillis par les individus au cours des différents épisodes dont ils sont victimes. Une consultation chez un médecin est alors nécessaire pour effectuer une évaluation des antécédents médicaux ainsi que pour identifier les différents troubles qui peuvent être associés à la paralysie du sommeil : troubles du comportement, choc émotionnel, troubles du sommeil, ou encore anxiété. Des troubles du sommeil tels que des insomnies ou de la narcolepsie sont à prendre en compte. Un suivi des phases de sommeil au moyen d’une polysomnographie permet de relever l’activité électrique dans les muscles, et ainsi de caractériser la paralysie du sommeil grâce au relevé d’un bas niveau de cette activité électrique.
Ainsi, d’après certaines études8, la qualité du sommeil et les troubles qui y sont associés (insomnie, narcolepsie, état de fatigue, cauchemars), de même que quelques troubles du comportements, pourraient permettre de diagnostiquer la paralysie du sommeil.
Il n’existe pas de traitement à proprement parler pour traiter la paralysie du sommeil. En revanche, on peut tenter de traiter une partie des causes supposées de ce phénomène9, à savoir :
La paralysie du sommeil n’est pas dangereuse pour l’intégrité physique des personnes qui en sont victimes. Néanmoins, elle reste stressante et angoissante pour la majorité des personnes qui en souffrent du fait de l’association entre l’état de conscience dans lequel on se trouve et la paralysie qu’elle cause, sans parler des possibles hallucinations. Si elle peut toucher tout le monde lorsque l’on parle de paralysie isolée récurrente, sa forme associée à la narcolepsie est, elle, plus sévère.
Pour compléter le propos sur la paralysie du sommeil, voici un lien vers une vidéo « Ted » (« Les terreurs de la paralysie du sommeil » par Ami Angelowicz) qui illustre très bien ce surprenant et mystérieux phénomène !
Sources :
[1] Lifetime prevalence rates of sleep paralysis: A systematic review, Brian A. Sharpless, Jacques P. Barber, “Sleep Medicine Reviews”, octobre 2011 [2] Prevalence and pathologic associations of sleep paralysis in the general population , M.M. Ohayon, J. Zulley et al, “Neurology”, avril 1999 [3] Relationships between sleep paralysis and sleep quality: current insights, Dan Denis, “Nature and Science of Sleep”, novembre 2018 [4] What You Should Know About Sleep Paralysis, site « SleepFundation », 2020 [5] L'expérience effrayante de la paralysie du sommeil, le cauchemar éveillé, site « rtbf.be », 2018 [6] The Nightmare, official trailer, extrait du documentaire, site « Youtube », 2015 [7] Isolated sleep paralysis, N.S. Sawant, S.R. Parkar et al, “Indian Journal of Psychiatry”, octobre-décembre 2005 [8] Relationships between sleep paralysis and sleep quality: current insights, Dan Denis, “Nature and Science of Sleep”, novembre 2018 [9] Troubles du sommeil de l’enfant et de l’adulte, site « Collège des Enseignants de Neurologie », 2020La narcolepsie, un trouble du sommeil à part
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