La narcolepsie : zoom sur une maladie rare
La narcolepsie, un trouble du sommeil à part
Troubles du sommeil - 11 minutes de lecture
L’hypersomnie, ou quand le sommeil devient fatiguant, qu’il abuse de votre temps et de votre santé. Cette maxime aurait pu être extraite d’une fable de La Fontaine, mais il s’agit hélas de l’implacable constat auquel on fait face lorsque l’hypersomnie pointe le bout de son nez.
Pathologie relativement méconnue dans ses origines quand elle prend la forme de l’hypersomnie idiopathique, cette « super » ou « hyper » fatigue au long cours navigue dans la vie des personnes qui en souffrent sans jamais se soucier de la durée de sa croisière de sommeil, ni des courtes escales de l’éveil. Origine incertaine, voire inconnue, connaît-on vraiment les causes de l’hypersomnie ?
Protéiforme, ce trouble du sommeil trouve un port d’attache dans plusieurs pathologies et dans de nombreux diagnostics. Mais alors, que sait-on réellement sur l’hypersomnie ? Voici quelques éléments de réponses proposés par le Capitaine Sommeil, commandant du navire Hypersomnia !
D’après l’INSERM1 (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale), l’hypersomnie se définit comme un trouble neurologique caractérisé par un état de fatigue important et un besoin excessif de sommeil. Elle se traduit également par de nombreuses somnolences diurnes.
On distingue 2 types d’hypersomnies :
En règle générale, on considère qu’une personne est hypersomniaque lorsqu’elle dort plus de 11 heures par jour, ce qui constitue une croisière du sommeil somme toute assez conséquente !
L’hypersomnie est une maladie rare et, de ce fait, elle est difficile à quantifier. Cependant, on estime la prévalence de l’hypersomnie entre 4 et 6% de la population2 dans sa forme la plus fréquente (hypersomnies secondaires, par exemple l’hypersomnie psychiatrique).
Les hypersomnies primaires sont, elles, beaucoup plus rares, notamment l’hypersomnie idiopathique. Cette dernière toucherait de 1 à 5 personnes pour 10 000 (1-5/10 000)3 lorsqu’elle s’accompagne d’un rallongement de la durée du sommeil (jusqu’à 10 heures), ce qui est par exemple 5 fois moins que la prévalence de la narcolepsie. Quand elle ne s’accompagne pas d’une durée de sommeil rallongée, elle est encore plus rare, avec une prévalence qui serait de l’ordre de 1 pour 100 0004.
L’hypersomnie idiopathique interviendrait entre 20 et 30 ans, et toucherait les hommes comme les femmes. Cependant, il existe très peu de données pour chiffrer davantage l’hypersomnie.
Elles concernent la majorité d’entre nous et, contrairement aux hypersomnies primaires, les causes des hypersomnies secondaires sont identifiables. Elles peuvent toucher tout un chacun au cours d’une vie, notamment lorsqu’elles résultent d’une pathologie ou qu’elles sont consécutives à un trouble du sommeil. Voici les principales hypersomnies secondaires :
Pour ce type d’hypersomnie, les causes ne sont pas suffisamment connues. Une hypersomnie primaire n’est pas la conséquence d’une maladie, d’un trouble psychiatrique ou d’un comportement.
Néanmoins, on suppose qu’un mauvais fonctionnement de certains systèmes d’éveil pourrait être en cause. Dans le cas de l’hypersomnie idiopathique, il semblerait que 20 à 30 % des cas fassent suite à des antécédents familiaux5.
On le voit bien ici, les hypersomnies centrales (ou primaires) se révèlent encore bien mystérieuses quant à leurs origines, peut-être encore plus que certains autres troubles du sommeil, donnant alors à cette croisière du sommeil un caractère presque surnaturel ! Il est en effet des phénomènes que la science et la médecine ne peuvent pas encore bien expliquer.
Les symptômes de l’hypersomnie sont assez caractéristiques, même si on les retrouve dans d’autres pathologies. Voici les principaux symptômes communs aux différents types d’hypersomnies :
L’hypersomnie idiopathique, elle, présente des caractéristiques particulières :
Dans le cas de l’hypersomnie récurrente/syndrome de Kleine-Levin, les caractéristiques sont les suivantes :
En ce qui concerne la narcolepsie, qui est également considérée comme une hypersomnie centrale, les symptômes de fatigue excessive, de temps de sommeil rallongé peuvent également se manifester, mais elle est surtout caractérisée par la cataplexie (perte de tonus musculaire).
L’hypersomnie se diagnostique avant tout grâce à un interrogatoire effectué par le médecin, ainsi qu’un examen clinique et psychologique. On pratique alors un diagnostic d’exclusion, c’est-à-dire qu’on cherche à éliminer les autres causes possibles d’hypersomnolences (fatigue chronique, surmenage, décalage de phase, consommation de drogues hypnotiques ou de médicaments sédatifs, sevrage de drogues stimulantes…).
L’hypersomnie idiopathique est la plus difficile à diagnostiquer. À la suite de cet interrogatoire approfondi, après avoir éliminé les autres causes possibles de somnolences et le syndrome de fatigue chronique, il faut reconnaître et caractériser l’excès de sommeil. Le médecin peut alors orienter le patient vers différents examens :
Pour certaines hypersomnies secondaires, des analyses complémentaires (imagerie cérébrale, biologie) peuvent être nécessaires afin de les caractériser.
De nos jours, on peut assez simplement « s’autodiagnostiquer » en ce qui concerne la somnolence, en réalisant un test en ligne6 sur des sites ou blogs spécialisés. Les réponses aux questions déterminent facilement des problèmes de somnolences diurnes excessives grâce à l’échelle d’Epworth. N’ hésitez pas à gravir cette échelle afin d’en savoir plus en cas de fatigue ou de somnolences incongrues !
À toutes fins utiles, Capitaine Sommeil, commandant du navire Hypersomnia, informe les plus sages d’entre nous (pour ne pas dire les plus anciens !) que des somnolence diurnes excessives qui commencent à se manifester chez les personnes âgées doivent alerter ces dernières (ou leur entourage). En effet, une étude récente7met en avant que ces somnolences pourraient être annonciatrices de maladies chroniques, avec « un risque de diabète ou d’hypertension artérielle multiplié par 2,3 » et « un risque de cancer multiplié par 2 ». Il convient donc de surveiller le sommeil de nos glorieux anciens (matelots) !
On ne sait pas comment soigner l’hypersomnie, il n’y a que des traitements symptomatiques permettant de réduire ses effets sur les patients. La difficulté à diagnostiquer certaines hypersomnies centrales (hypersomnie idiopathique) et l’appréhension très délicate des médicaments qui y sont associés font que le traitement de l’hypersomnie, en tant que maladie rare, passe essentiellement par des «Centres de référence et de compétence Narcolepsies et Hypersomnies Rares ».
Le traitement des symptômes est essentiellement médicamenteux :
Bien entendu, les traitements médicamenteux comportent des risques d’effets secondaires. D’autre part, lorsque le patient souffre d’hypersomnie psychiatrique, il est extrêmement difficile de la traiter du fait que certains antidépresseurs causent eux-mêmes des troubles du sommeil !
En outre, dans le cas de l’hypersomnie idiopathique, les stimulants de la veille n’ont aucun effet positif sur l’inertie du réveil (« ivresse du réveil »).
Dans tous les cas, l’éducation thérapeutique est indispensable. Connaitre sa maladie, respecter une hygiène de vie adaptée (limiter la consommation d’alcool, avoir une activité physique régulière…), mettre en place des « rituels de sommeil » (horaires fixes pour les siestes, le coucher et le lever) sont autant de réflexes du quotidien qui peuvent permettre de soulager les symptômes de l’hypersomnie.
Cependant, des progrès dans l’identification des causes de cette maladie et les avancés thérapeutiques qui en découleraient sont vivement attendus afin rendre l’expérience de la croisière du sommeil un peu (voire beaucoup) moins contraignante ! Pensez donc à remplir le livre « dort » avant de débarquer !
Afin d’illustrer le propos sur le sujet de l’hypersomnie, voici une vidéo du « Neuroscience Education Institute » qui résume les tenants et les aboutissants de ce trouble du sommeil.
Sources :
[1] et [4] Hypersomnies et narcolepsie : quand trop dormir est pathologique, site de « l’INSERM », septembre 2017 [2] Hypersomnia, Y. Dauvilliers, A. Buguet, « Dialogues in Clinical Neuroscience », décembre 2005 [3] Hypersomnie idiopathique, site « Orphanet », juillet 2020 [5] L’Hypersomnie idiopathique, site « Fondation Sommeil », 2020 [6] Souffrez-vous de troubles du sommeil ?, site « Fondation Sommeil », 2020 [7] Hypersomnolence is a Significant Predictor of New Medical Conditions Among Elderly People in a Longitudinal Study of the General Population, Maurice M. Ohayon, Shannon Sullivan et al, « Neurology », avril 2020La narcolepsie, un trouble du sommeil à part
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